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MÉTALLURGIE

Les métallos engagent une semaine d'action

12 mars 2018 | Mise à jour le 12 mars 2018
Par | Photo(s) : Martin Bureau / AFP
Les métallos engagent une semaine d'action

Manifestation de la métallurgie en octobre 2017

Frédéric Sanchez revient sur le processus de mobilisation engagé dans la métallurgie autour des enjeux de la convention collective nationale et de la bataille pour l'emploi industriel. Le leader de la FTM CGT livre aussi son analyse sur le processus de convergences en train de prendre corps. Interview.
La fédération de la métallurgie organise une semaine d'action du 12 au 16 mars avec un temps fort le 15 mars. D'où est partie cette mobilisation ?

Nous sommes inscrits dans un processus de mobilisations depuis plusieurs mois pour porter notre projet de convention collective nationale. Des initiatives se sont tenues devant les représentations régionales de UIMM (patronat de la métallurgie), puis un temps fort national a eu lieu le 13 octobre devant le siège national avec 4 500 métallurgistes. Ils y ont déposé les pétitions remontées des différents territoires. Le processus se poursuit avec la semaine de mobilisation du 12 au 16 mars. C'est une semaine de déploiement en territoires avec un temps fort le 15 mars.

L'idée est qu'il y ait des manifestations dans l'ensemble des départements avec des appels à la grève dans un maximum d'entreprises de la métallurgie. Il s'agit de porter le projet de convention collective des métallos en lien avec la dimension industrielle. Les deux éléments sont inséparables : pas de garanties collectives sans une industrie forte et pas d'industrie forte sans garanties collectives. Le processus prend forme avec une prise en compte de plus en plus intéressante des militants, des syndiqués, mais aussi plus largement des salariés. Cette semaine d'action s'inscrit donc dans une nouvelle étape d'un rapport de force pour peser sur la négociation nationale en cours.

Et qu'en est-il des négociations avec l'UIMM ?

La bataille est ouverte face à l'UIMM et au gouvernement, car lorsqu'on fait le parallèle entre ce que propose le patronat et les mesures du gouvernement, on voit bien que tout est imbriqué.   Médiatiquement, on entend qu'il y aurait des salariés privilégiés, notamment pour le statut des cheminots qui est attaqué de toutes parts. Pour les métallos, il en va de même avec les enjeux des garanties collectives arrachées au cours des précédentes décennies. Nous bataillons pour un statut du métallo qui couvre l'ensemble des salariés de la branche avec des garanties collectives tirées vers le haut, que ce soit sur les salaires, la reconnaissance des qualifications, le temps de travail, l'égalité femmes-hommes. Et sur toutes ces questions, nous avons besoin que les métallurgistes s'expriment.

Mais les négociations actuelles remettent en cause des conquêtes sociales majeures…

C'est l'ensemble du champ conventionnel qui est aujourd'hui remis à plat par le patronat. Dans cette globalité, nous avons identifié la question des classifications comme l'axe majeur de notre convention collective. Il y a sur ce point une remise en cause historique avec la possibilité donnée aux directions d'entreprise de démolir toutes les grilles construites au cours des années. On y substituerait des grilles où le salarié ne serait plus qualifié au regard de ses compétences, ses diplômes et l'expérience qu'il a pu acquérir avec l'ancienneté, mais qui qualifierait le poste de travail.

Cela sous-tend une dégradation des conditions de travail, une robotisation avec des gestes répétitifs pour les salariés. À l'image du lean manufacturing, c'est un système où tout l'aspect humain du savoir-faire du salarié disparaîtrait pour laisser la place à des automates. Le salarié est payé selon le poste où il est affecté pour des gestes répétitifs. Au travers des classifications, c'est donc une attaque frontale. Il en va de même sur le temps de travail, avec une disparition des repères pour un temps de travail défini. L'UIMM est diamétralement opposé à la revendication CGT des 32 heures. Ils nous proposent d'exploser le nombre des heures supplémentaires, explosion aussi du forfait jours pour les ingénieurs et cadres, des possibilités de diminuer les temps de repos d'un jour à l'autre. Cela nous ramènerait 70 ans en arrière.

Des actions sont aussi prévues autour de l'emploi industriel…

Parallèlement aux garanties collectives et à ce que j'ai défini comme le statut des métallurgistes, il y a effectivement les enjeux autour de pans entiers de l'industrie dans des filières qui ont pourtant été reconnues d'excellence et d'utilité nationale. Pour n'en citer qu'une, la sidérurgie qui est aujourd'hui menacée avec des risques importants de perte de savoir-faire, d'emplois et de capacité industrielle.

De ce point de vue, les sidérurgistes ont décidé de fortes actions le 15 mars sur les trois régions où ils sont implantés : à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône), à Hagondange (Moselle) et dans les Hauts-de-France. L'objectif est de peser sur les choix des grands donneurs d'ordres, notamment ArcelorMittal, qui en ce moment redistribue les cartes de toute la filière sidérurgique. Le 15 mars articulera donc la dimension industrielle et les garanties collectives. De plus, cette journée d'action de la métallurgie s'articulera avec celle des retraités sur le pouvoir d'achat, la CSG et les retraites complémentaires (Agirc-Arrco). Un appel qui est lancé par neuf organisations syndicales de retraités à cette même date et qui se conjugue aussi avec l'action des EHPAD. Le 15 mars s'ajoute aussi l'action des organisations lycéennes et étudiantes qui s'opposent aussi aux réformes que le gouvernement veut imposer sans dialogue social. Cette journée du 15 mars s'inscrit aussi dans un processus avec l'objectif de construire une journée d'action interprofessionnelle, si possible unitaire, début avril.

Sur quelle base pourrait se construire cette action interprofessionnelle ?

La question des salaires et du pouvoir d'achat qui pourrait être le dénominateur commun d'une mobilisation interprofessionnelle. On le voit dans nos débats avec les militants, les salariés et plus largement dans la population. La question du pouvoir d'achat est problématique depuis plusieurs années, mais elle s'accentue avec la politique actuelle du gouvernement. Elle peut créer une dynamique de mobilisation et créer des convergences de luttes entre différentes professions.

Quand on voit l'attaque portée sur les salariés de la fonction publique avec le gel du point d'indice ou les jours de carence pour la maladie, l'orientation du gouvernement est clairement d'attaquer le pouvoir d'achat. Pour les cheminots, c'est aussi le statut et les salaires qui seront au cœur de la bataille qu'ils vont mener. Alors oui, il y a besoin d'avoir un maximum de luttes dans l'ensemble des professions. Il ne s'agit pas de créer des divisions entre les actions des professions.

Plus il y aura des actions dans les professions à partir des spécificités des uns et des autres, et plus on sera en capacité de construire le tous ensemble. Et ce tous ensemble ne se construira que s'il y a eu des actions en amont dans les professions. Et le seul moyen pour qu'il y ait des actions dans les professions, c'est de mettre dans les mains des salariés les propositions et les contenus revendicatifs de la CGT.

Pensez-vous que les conditions sont réunies pour une telle mobilisation ?

L'état d'esprit d'une grande partie de la population est anéanti et aseptisé par les médias et les messages permanents qui sont véhiculés comme « on ne peut pas faire autrement », « certains sont des privilégiés ». On ne peut accepter que les entreprises du CAC 40 se répartissent 100 milliards de profits tandis que la pauvreté s'accroît. Les enjeux de société qui sont pointés auront des conséquences sur les jeunes générations.

Au-delà de l'opposition aux différentes réformes mises en place par le gouvernement, il y a besoin de gagner sur de nouvelles revendications ; la semaine des 32 heures, un départ de grille salariale à 1 800 euros, un service public de qualité, une industrie au service des populations et non au service du capital. C'est de cela qu'on doit discuter avec les salariés et la population dans la période. Et je pense que tous les ingrédients sont réunis pour pouvoir arriver à une victoire.