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SALAIRE

Des miettes pour les salariés d’IKEA

31 mai 2017 | Mise à jour le 30 mai 2017
Par | Photo(s) : Hocine Redouani
Des miettes pour les salariés d’IKEA

Rien ne va plus chez Ikea. Face au 0 % d'augmentation proposé par la direction du géant du mobilier en kit lors du démarrage des NAO, les salariés de plusieurs dépôts et magasins ont lancé un mouvement de grève qui s'étend.

« 0 % d'augmentation collective de salaire et 1,1 % – contre 1,6 % l'an dernier – de la masse salariale à répartir à la tête du client. Voilà ce que propose la direction d'Ikea à ses salariés pour démarrer les négociations annuelles obligatoires [NAO] », s'étrangle Houcine Redouani, DSC adjoint CGT du groupe France. Et d'enchaîner : « pas de bonus car c'est, selon eux, hors NAO, pas d'intéressement presque partout et pas de prime compensatoire du type supplément d'intéressement non plus… tout ça parce que les résultats du groupe ne sont pas à la hauteur de leur souhait ».

Déclarer moins de bénéfices pour redistribuer moins aux salariés

Quand on sait que la multinationale du numéro un mondial de l'ameublement a engrangé plus de 3 milliards d'euros de bénéfices dans le monde en 2016 avec un chiffre d'affaires de 38 milliards, on a du mal à le croire. Sauf que, loin de l'image conviviale et douce que la marque distille à travers ses campagnes de publicité auprès des consommateurs, elle mène une stratégie globale opportuniste et une politique fiscale ultra-agressive.

Sans en avoir le monopole – d'autres comme Amazon, Apple, Google, etc., le font aussi – l'enseigne a défrayé la chronique de l'évasion fiscale en 2016. En pleine offensive contre ce fléau international, au début de l'année dernière la Commission européenne a en effet confirmé lancer une enquête sur le géant, accusé d'avoir dissimulé 1 milliard d'euros dans un rapport rédigé par des eurodéputés écologistes. Le texte montrait notamment « comment l'entreprise multinationale suédoise s'est structurée pour soustraire à l'impôt plus d'un milliard d'euros ces six dernières années au détriment de divers États européens ». Et précisait : « Ikea a essentiellement utilisé des échappatoires fiscales qu'offrent les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg. » De son côté, le groupe répond qu'il paye « ses impôts conformément aux législations nationales et internationales ». « Ils ont admis que ce n'était pas très socialement correct mais légalement inattaquable. Concrètement, ils déclarent le moins possible de bénéfices pour redistribuer le moins possible aux salariés », réagit le syndicaliste.

Perte du pouvoir d'achat

Depuis 2010, les salariés d'Ikea auraient globalement subi une perte de rémunération globale d'environ 2 000 euros. La stratégie de l'entreprise consisterait, d'une part, à fixer des objectifs inatteignables et, de l'autre, à privilégier une logique d'augmentations individuelles. « C'est une rupture avec la tradition de la maison qui garantissait, jadis, des augmentations de salaire collectives pour faire face à l'augmentation du coût de la vie », relève Houcine Redouani. Or, un vendeur à plein temps chez Ikea – et qui travaille donc un week-end sur deux – gagne environ 1 400 euros net mensuels. L'année dernière, l'enveloppe moyenne de 1,6 % de la masse salariale d'enveloppe allouée aux NAO avait permis à 85 % des salariés de percevoir moins de 1 % d'augmentation salariale. Du coup, les salariés sont à bout et malgré la dispersion syndicale dans les magasins, ceux-là pourraient bien emboîter le pas à leurs collègues déjà mobilisés dans les dépôts des meubles en kit. Mobilisés depuis le 5 mai, leur intersyndicale CGT, CFDT, Unsa, CFE-CGC, a rejeté la prime de 200 euros annuels proposée par Ikea alors que le salaire moyen dans le secteur plafonne à 1 800 euros.

Mobilisation syndicale

Regrettant l'absence d'intersyndicale au sein des magasins, le syndicaliste se réjouit du rapprochement des luttes des entrepôts de celles des magasins qui, traditionnellement, négociaient séparément. Mardi 23 mai, les élus CGT ont quitté la table du premier rendez-vous NAO et plusieurs syndiqués ont pacifiquement occupé le siège social d'Ikea en signe de protestation. Dans la foulée, plusieurs magasins sont entrés dans la mobilisation. Réclamant une augmentation collective de 4 % des salaires au titre des NAO, un quatorzième mois à tous les salariés d'Ikea France ou, à défaut, une prime exceptionnelle pour 2 017 équivalente à un mois de salaire pour compenser le bonus et l'intéressement de zéro euro, près d'une centaine de salariés étaient en grève vendredi dernier dans le magasin Ikea de Saint-Priest, près de Lyon, et une quarantaine dans celui de Villiers-sur-Marne, en région parisienne. Un mouvement qui devrait s'intensifier à l'approche du prochain rendez-vous NAO prévu le 1er juin.