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BREXIT

Syndicalisme britannique et Brexit : « la CES sera notre 
seul lien avec l’Europe »

17 mars 2019 | Mise à jour le 14 mars 2019
Par | Photo(s) : Benjamin Furst / Hans Lucas
Syndicalisme britannique et Brexit : « la CES sera notre 
seul lien avec l’Europe »

Un manifestant anti-Brexit porte une pancarte sur laquelle est écrit ‘“Brexit, en vaut-il le coup ?” lors de la marche du "People's Vote March for the Many" à Liverpool au Royaume-Uni où des centaines de personnes se sont rassemblés pour demander un referendum sur l'accord final de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, alors que le sommet annuel du parti travailliste britannique se tient dans à Liverpool - 23 Septembre 2018.

Le Brexit ne sera pas sans conséquences sur les travailleurs britanniques, même si les syndicats tentent de les atténuer comme ils le peuvent. Entretien avec Elena Crasta, responsable du bureau européen de la confédération britannique (Trades Union Congress, TUC), à Bruxelles.
À quelles conséquences doivent s'atten­dre les travailleurs britanniques avec la sortie de l'Europe ?

D'une manière générale, le niveau de protection au Royaume-Uni est assez faible, même si l'on y applique les mêmes directives que dans le reste de l'Europe. On a, par exemple, la même régulation sur le temps de travail hebdomadaire, avec une limite de 48 heures, mais quand le Royaume-Uni a adopté cette directive, il a aussi adopté un « opt-out », une dérogation permettant de renoncer à cette limite hebdomadaire.

Autre exemple, une directive européenne assure­ l'égalité des salaires entre intérimaires et travailleurs en poste. Après l'avoir combattue, le Royaume-Uni a fina­le­ment capitulé, mais avec une nouvelle dérogation : que cette parité ne s'applique pas pendant les douze premières semaines de contrat. Et les intérimaires changent à la onzième ! On peut donc craindre – et ces craintes sont ­justifiées par le fait que les conservateurs n'en font pas mystère – qu'une fois en dehors de l'UE et n'étant plus assujettis aux normes européennes, ceux qui veulent un modèle économique davantage dérégulé se débarrassent de ce qu'ils perçoivent comme des entra­ves, autrement dit les droits de nos travailleurs.

Comment réagissent les syndicats britanniques face au Brexit ?

Nous nous sommes opposés à ce projet dès le début. Et on s'est battus pour que, dans les termes de cette sortie, figure une période transitoire de deux ans – prolongeable d'un an – pendant laquelle le droit européen continue de s'appliquer. Et nous avons également insisté pour que les instances européennes intègrent, dans le cadre de leurs relations futures avec le Royaume-Uni, une clause de « level­ playing field », c'est-à-dire la nécessité de maintenir une concurrence loyale pour que chacun joue avec des mêmes règles.

Si le Royaume-Uni veut continuer à bénéficier d'un accès au marché européen, il devra se soumettre à certaines règles communes que nous, syndicats anglais et européens réunis, avons demandées sur les droits sociaux ou sur la protection de l'environnement, par exemple. C'est une condition que l'Union européenne n'avait jamais posée dans ses traités de commerce internationaux.

Quels sont les résultats des bonnes relations du TUC avec 
ses homologues européens ?

Il y a eu beaucoup de solidarité de la part des autres mouvements syndicaux pendant toutes ces négociations sur le Brexit. Mais ce n'est pas une solidarité gratuite, dans le sens où chacun a compris qu'il n'était dans l'intérêt de personne que le Royaume-Uni se transforme en une sorte de Singapour et qu'une concurrence déloyale tire les autres travailleurs vers le bas.

Protéger l'intérêt des travailleurs en Angleterre, c'est aussi protéger celui des travailleurs dans le reste de l'Europe. Il ne faut pas oublier non plus qu'un certain nombre de citoyens européens résident au Royaume-Uni, et eux aussi ont tout intérêt à ce que le marché du travail anglais reste réglementé.

Cette sortie de l'UE est-elle de nature à changer vos rapports 
avec les syndicats européens ?

Nous resterons membres de la Confédération européenne des syndicats (CES), avec le risque de nous retrouver dans une situation où notre appartenance à la CES devienne notre seul lien avec l'Europe. Beaucoup de dossiers, notamment ceux concernant les questions sociales ou environnementales, ont avancé grâce aux lobbyings, aux pressions politiques de la CES auprès des gouvernements et des institutions européens.

Cela nous a ainsi permis de mettre le gouvernement anglais en minorité en Europe et de contourner son opposition pour faire passer ces directives et les transposer dans notre cadre national. Il nous faut donc nous accrocher à ce dernier lien, même si nous devrons subir les conséquences de cette nouvelle relation que nous n'avons pas choisie. Les dossiers, les revendications que nous présenterons risquent donc d'être traités avec un peu moins d'importance.

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