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RÉPRESSION SYNDICALE

Répression syndicale chez Geodis

26 avril 2018 | Mise à jour le 26 avril 2018
Par | Photo(s) : DR
Répression syndicale chez Geodis

Tout a commencé dans la foulée de deux mouvements de grève successifs, les 13 et 14 février puis les 22 et 23 février, sur la plateforme de colis express Geodis-­Calberson de Gennevilliers (Hauts-de-Seine), un site pivot par lequel transitent tous les flux de colis nationaux de Geodis. Initiées par la CGT, syndicat implanté et devenu majoritaire lors des élections professionnelles de 2017 (87 % dans le 1er collège, 27 % dans le 2e collège), ces grèves ont pris la forme de débrayages de deux heures.

Les revendications portent sur trois aspects majeurs : la revalorisation des salaires, qui n'évoluent plus depuis des années ; la dénonciation du recours massif et abusif à l'intérim (130 intérimaires pour 180 salariés en contrat à durée indéterminée) assortie d'une demande de requa­lification en CDI d'une trentaine de ces intérimaires, tous affectés aux tâches les plus pénibles. Enfin, cette exigence particulièrement urgente : l'amélioration des conditions de travail, à haut risque sur cette plateforme où la logique du flux tendu entraîne de nombreux accidents graves (pieds broyés, membres arrachés, troubles musculo-squelettiques – TMS – avec des séquelles lourdes…) qui touchent en priorité les manutentionnaires, donc les intérimaires. « Nous revendiquons la pérennité de leurs emplois pour qu'ils aient au moins accès à des formations à la manipulation d'engins dangereux car inadaptés à la surface de travail », explique la CGT Geodis. Exemple type : la pointeuse à colis fixée au bras du manutentionnaire est si lourde qu'elle provoque des TMS.

Bref, des revendications on ne peut plus légitimes pour l'intérêt général des salariés, et qui ne sont pas contradictoires avec l'intérêt de l'employeur à qui incombe une obligation de résultats en matière de prévention de la santé des travail­leurs. Ignorant ces dispositions légales, la direction de Geodis a pris le parti d'ignorer les revendications et de réprimer ceux qui les portent. Faisant fi du droit de grève, Geodis a riposté aux débrayages en dégainant un arsenal répressif et punitif brutal et très ciblé contre la CGT et ses onze élus qui siègent dans les instances représentatives du personnel (comité d'entreprise, CHSCT, etc.). Un à un, ils ont été convoqués à des entretiens préalables avec mise à pied conservatoire et autres sanctions disciplinaires, toutes susceptibles d'aboutir au licenciement pour faute lourde.

Sollicitée pour autoriser les demandes de licenciement de ces salariés protégés, l'inspection du travail des Hauts-de-Seine mène une enquête contradictoire, tandis que les onze élus, sans salaire depuis les sanctions, s'affairent sur tous les fronts pour intensifier la mobilisation engagée en février. Exercice à haut risque mais gagnable de l'avis de Frédéric­ Michaut, secrétaire général de l'union locale (UL) de Gennevilliers, d'autant plus que les sanctions ne sont pas fondées. « Les dossiers sont vides, les grévistes n'ont commis aucune faute, mais la direction joue la carte de la terreur pour dissuader les salariés, surtout les intérimaires, de poursuivre la mobilisation » analyse-t-il.

« La grève pour pas qu'on crève », c'est le slogan déterminé qui s'affiche sur les banderoles de la CGT lors d'un rassemblement de soutien aux harcelés, organisé le 6 mars au port de Gennevilliers, devant les locaux de Geodis. Événement réussi qui a rassemblé divers syndicats CGT, de l'énergie, de la SNCF, des transports, l'UL de Gennevilliers et l'union départementale (UD) des Hauts-de-Seine, pour exiger le retrait des sanctions. En vain. « Notre collègue Frédéric, premier élu CGT au collège cadres, a été mis à pied pour agression d'un chef de quai alors qu'une vidéo montre que c'est le chef de quai qui l'agresse. On marche sur la tête », s'indigne Mouloud Sahraoui, secrétaire du syndicat CGT de Geodis Gennevilliers.

De son côté, la direction de Geodis maintient d'une main de fer son cap répressif. La stratégie est bien connue : déporter le conflit du travail sur le terrain judiciaire afin de repousser au maximum les délais de résolution du conflit. Une pratique qui permet de contourner le dialogue social avec les syndicats et les IRP. Le but ? Gagner du temps pour laisser pourrir le conflit. Et aussi décourager, démobiliser, diviser, voire pousser au renoncement ceux qui se battent pour leurs droits légitimes. Seule inconnue dans cette équation : le temps d'endurance de salariés qui ont tout à gagner en menant leur bataille.