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FN : l’irrésistible ascension  ?

Jean-François Jousselin
22 octobre 2013 | Mise à jour le 30 novembre 2016
Par | Rédacteur
Il a soufflé ces temps derniers comme un vent de panique sur la France. On a ainsi vu un ancien Premier ministre plaider pour le vote sans sectarisme – autant dire sans principe – même face à un candidat d'extrême droite.

Un ministre de l'Intérieur censément de gauche enfourcher le pire discours de droite pour mettre au ban une communauté déclarée non intégrable. On a vu aussi des candidats à des primaires socialistes réclamer l'usage de drones pour la surveillance des quartiers déshérités de Marseille. On en passe et des meilleures. Toutes ces gesticulations n'étaient guidées que par l'espoir de sauver les meubles à quelques encablures de consultations politiques qui s'avèrent chaque jour un peu plus périlleuses. Le problème, c'est qu'elles contribuent à accroître cette confusion des valeurs dont le Front national est l'expression en même temps que le grand bénéficiaire. Résultat, le vent de panique ne fait que lui gonfler les voiles.

Le désenchantement politique n'est pas un épiphénomène, que l'amélioration d'indicateurs suffirait à endiguer

C'est en tout cas un des enseignements qu'il n'est pas abusif de tirer des résultats des élections cantonales de Brignoles qui nous suggèrent trois autres observations. La première est qu'il n'est jamais bon de prendre des vessies pour des lanternes. Et, au prétexte des risques que fait courir à la démocratie la montée du score de la formation de Marine Le Pen, de renvoyer sous l'étiquette de fascistes, autrement dit aux poubelles de l'histoire, la majorité de ses électeurs. Le FN prospère sur la crise de la société et sur le vide des réponses politiques qui lui sont apportées. C'est pourquoi comprendre les motivations de ceux qui votent pour lui et combattre le FN ne sont que les deux faces d'une même nécessité auxquelles il ne faut surtout pas renoncer. La deuxième observation est qu'on aurait tort cependant de voir dans cette progression du FN le seul effet de la conjoncture. Le désenchantement de la politique et la désaffection vis-à-vis des partis politiques dits « traditionnels » dont témoigne aussi la montée des abstentions, ne datent pas d'hier. On ne saurait donc réduire ces manifestations électorales à un épiphénomène, que l'amélioration de quelques indicateurs suffirait à endiguer.

C'est pourtant ce que semblent croire le président et son gouvernement qui, depuis quelques semaines, clament venu le temps des résultats. Outre le fait que tous les sondages attestent que les Français n'y croient guère, il n'est pas interdit de penser que le gouvernement et ses ­ministres se trompent de perspectives. Chercher avec ténacité à obtenir des résultats – même si nous pensons que le chemin suivi n'est pas le bon –est certes louable. Mais penser que 0,2 % de croissance en plus, 0,5 point de déficit en moins et un chômage qui de toute façon flirte peu ou prou avec trois millions de sans-emploi suffiront à effacer la défiance, la perte de repères et l'inquiétude face à l'avenir, relève au mieux de la pensée magique, au pire de la cécité. Car, et c'est notre troisième et dernière observation, cela ne suffira pas à refaire société. Une société qui pourtant manque. Et qui manque d'abord aux plus exposés, au moins protégés, bref aux classes populaires bien davantage qu'aux classes possédantes. Or, c'est à ce carrefour où la nostalgie de la société du passé rencontre l'individualisme effréné du présent que se situe le Front national. C'est donc à retisser des liens et à jeter des ponts, ce que devrait faire toute politique, qu'il faut résolument s'attacher. Pour que la progression du FN ne soit pas, comme désormais on nous la présente, une « irrésistible ascension ».