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HÔPITAL

Les urgences craquent de toutes parts

25 avril 2018 | Mise à jour le 25 avril 2018
Par | Photo(s) : Nicolas Liponne / AFP
Les urgences craquent de toutes parts

Environ 50 personnes des urgences de Lyon ont fait un die-in place la Comédie, le 16 avril 2018.

Les conflits sociaux se multiplient dans les services d'urgences  des hôpitaux. Manque de bras, de locaux, de lits d'hospitalisation, restructurations et concentrations de services, restrictions d'ouverture la nuit provoquent une embolie permanente.

Des personnels des urgences de plusieurs hôpitaux de Lyon en grève, pour certains depuis plusieurs mois, ont organisé lundi 16 avril devant l'hôtel de ville de Lyon un die in pour réclamer « des moyens pour la santé » en se couchant sur le sol. Ce mouvement concerne plusieurs services lyonnais : centre hospitalier psychiatrique du Vinatier, l'hôpital Édouard Herriot, le centre hospitalier Lyon-Sud, l'hôpital Saint-Joseph-Saint-Luc et l'hôpital de la Croix-Rousse. Cette action spectaculaire, au lendemain de l'interview d'Emmanuel Macron, témoigne du profond ras-le-bol des professionnels des urgences, des communautés hospitalières et des populations de certains bassins où les services sont voués à être fermés. Face à cette crise sociale et sanitaire, le gouvernement a annoncé mi-février « une réforme globale du système de santé » et Emmanuel Macron a indiqué qu'il annoncerait « fin mai » des décisions sur l'hôpital. Des promesses d'annonces qui ne calment pas les personnels, ni les praticiens.

Des conflits pour des moyens

Les services d'urgences hospitalières sont emblématiques de la crise qui frappe les établissements de soins dans notre pays. Loin de se résumer aux périodes épidémiques (grippe, gastro, bronchiolite), la saturation des services est devenue chronique. Elle provoque la colère des personnels qui, en maints endroits du pays, mènent ou ont mené des conflits pour obtenir des effectifs et des lits d'aval pour traiter les patients. C'est notamment le cas à Lyon, Toulon-La Seyne, Vannes, Strasbourg, Auch, Rochefort, Bourges, Trévenans, Poitiers, Bron, Montbeliard, Brest, Rouen… Et quand la cocotte minute n'a pas encore explosé, les médecins urgentistes n'hésitent plus à tirer la sonnette d'alarme dans la presse, comme ceux de l'hôpital Robert Ballanger à Aulnay-sous-Bois (93) où les locaux des urgences ont été conçus pour 40 000 passages par an, mais qui en ont accueilli 72 000 en 2017. « Il y a quotidiennement des patients sur des brancards dans les couloirs », rapportait une cheffe de service dans un article du Parisien le 22 avril dernier. Pourquoi une telle affluence ? « Dans le 93, il y a de moins en moins de médecins de ville. Ceux qui partent à la retraite ne sont pas remplacés et les jeunes ne veulent pas venir. Donc, les gens n'ont pas d'autre choix que les urgences ! »

Ailleurs, à Clamecy dans la Nièvre, ou à Tonnerre dans l'Yonne, population et personnels de santé se mobilisent pour sauver les services d'urgences de leurs hôpitaux. Le 13 mars dernier, à Clamecy, plus de 250 personnes (élus, médecins, personnels de santé, citoyens, pompiers) ont participé à un meeting-débat à l'invitation du maire de la ville pour dire non à la fermeture des urgences la nuit dans cette ville.

Organiser les convergencesFace à l'émergence de très nombreux conflits locaux sectoriels dans la santé et l'action sociale, la fédération CGT a mené durant tout le mois d’avril des semaines d'action pour faire converger et fédérer les luttes spécifiques sur des temps forts thématiques, comme sur la psychiatrie, la protection de l'enfance, les EHPAD, les urgences. L'idée étant de rendre visibles ces mobilisations, d’alerter les populations, d’impliquer les élus locaux, d’organiser des débats publics en territoires.

La CGT santé et action sociale veut ainsi peser, notamment sur les arbitrages du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) qui sont rendus en ce moment et de faire converger tous ces mouvements sur un temps fort à l'automne au moment du débat parlementaire sur le PLFSS 2019. Pour sortir les urgences de la crise, la CGT met en débat des propositions concrètes : moratoire sur les fermetures de lits, relèvement du numerus clausus dans la formation des médecins, possibilité de contractualiser avec les étudiants en médecine en vue de leur future installation sur le territoire afin de combattre les déserts médicaux à l'origine, pour partie, de la saturation des urgences.

100 000 patients par an sont hospitalisés sur des brancards

Selon le syndicat SAMU Urgences de France qui a lancé début avril un recensement quotidien de cette saturation, plus de 200 patients en moyenne dormiraient ainsi chaque nuit dans les couloirs d'hôpitaux français. Ce syndicat organise le « No bed challenge », classement des établissements sans lit disponible. Sur le podium ces derniers jours, le centre hospitalier de La Roche-sur-Yon, le CHU de Nîmes et celui de Limoges. Au total, quinze établissements ont laissé chaque nuit au moins huit patients sur des brancards.
Pour sa part, l'Association des médecins urgentistes de France (AMUF) estime que « 100 000 patients par an sont hospitalisés sur des brancards ». Un chiffre alarmant qui conduit l'AMUF à exiger « un moratoire sur les fermetures de lits. Nous demandons que les CTRU (comités techniques régionaux des urgences) soient réunis de manière urgente avant fin avril, avec comme objectif : aucune fermeture de lits dans tous les hôpitaux. Par ailleurs, nous redisons notre attachement au maintien de l'ensemble des structures d'urgences publiques ».

La partie la plus visible de la crise des hôpitaux

« Les urgences sont emblématiques : elles sont la porte d'entrée de l'hôpital et le réceptacle des insuffisances de la médecine de ville. On fait aussi appel à elles pour prendre en charge les personnes âgées dépendantes en phase aigüe, faute de soignants en nombre suffisant dans les EHPAD. Elles sont aussi la partie la plus visible de la crise hospitalière pour les usagers qui y attendent des heures, et pas seulement durant les périodes épidémiques. On y manque de bras et de lits d'aval pour accueillir correctement », explique la secrétaire générale de la CGT santé et action sociale dans une interview à paraître dans notre édition de la NVO de mai dans une enquête sur l'hôpital public. « Évidemment, cette dégradation ne date pas d'aujourd'hui. Elle résulte des réformes HPST (loi Bachelot « Hôpital patient santé territoire”) de l'application de la T2A (tarification à l'activité) ou de la loi santé de Marisol Touraine », rappelle Mireille Stivala.